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Jonathan Bory

Docteur en droit, Jonathan Bory partage aujourd’hui son temps entre ses activités d'avocat, d'entrepreneur et d'enseignant. Sa manière d’organiser ces différents rôles a évolué au fil du temps, reflétant l’évolution de ses centres d’intérêt ainsi que la possibilité de redéfinir ses priorités.

Jonathan Bory

Jonathan Bory

Avocat, chargé d’enseignement et entrepreneur

Le droit de se réinventer

“Il y a un conseil que j’aime bien qui est de s’engager dans des activités qui se situent à l’intersection entre ce qui nous passionne, ce pour quoi on est doué·e et ce dont on peut tirer un revenu. Mais au-delà de ça, il ne faut pas se mettre trop de barrières, on a le droit d’évoluer et de se réinventer”.

C’est après avoir effectué son stage d’avocat à Berne à l’issue de son master en droit, puis travaillé pendant quelques années dans une prestigieuse étude d’avocats à Genève, que Jonathan décide de se lancer dans un doctorat. Le moment était venu pour lui d’opérer un changement dans son parcours professionnel : 1“J’aimais beaucoup mon travail dans cette étude mais le rythme était très soutenu. Je manquais de temps pour lire et approfondir des recherches différentes de celles que je réalisais pour les client·es de l’étude. J’avais envie de me laisser guider davantage par ma curiosité et mon intérêt. La thèse s’est présentée comme une option de choix à ce moment-là”. Son doctorat, il l’envisage alors comme une parenthèse qui lui permettra de retrouver une certaine liberté et de satisfaire sa curiosité intellectuelle avant de retourner à nouveau à la pratique. Ayant obtenu un poste d’assistant-diplômé à l’Université de Lausanne, il entame sa nouvelle activité : “J’étais un peu optimiste et naïf, je pensais rédiger ma thèse en deux ans. Mais après six mois, j’ai réalisé que le sujet qui m’avait tenté au début ne correspondait pas à mes intérêts. J’ai alors modifié mon projet et cherché une nouvelle directrice de thèse. Finalement, j’ai fait ma thèse en six ans, sur la liberté contractuelle, et j’ai fait encore une pause avant de la publier”. Au cours de son doctorat, Jonathan effectue un séjour d’une année à l’Université de Columbia à New York grâce à une bourse du FNS : “C’était une expérience absolument géniale et d’une grande effervescence, Il y avait de nombreux débats avec d’autres chercheur·es sur des sujets divers et variés. J’ai découvert qu’on peut être juriste et s’intéresser à la psychologie, être juriste et utiliser des arguments de sociologie ou de philosophie politique. C’est une découverte qui a influencé l’argument principal de ma thèse qui repose sur une approche interdisciplinaire et applique les découvertes des sciences comportementales au monde du droit et à la question du consentement”. C’est également lors de ce séjour que Jonathan découvre le monde de l’entrepreneuriat, en tant que cofondateur d’une start-up de crowdlending. Cette expérience l’incite, à son retour en Suisse, à lancer une pratique d’avocat indépendant plutôt que de reprendre son activité d’assistanat à l’université. En parallèle, Jonathan travaille aussi régulièrement comme juge conciliateur au tribunal des prud’hommes et suit une formation à la médiation. Mais les exigences de ces différentes activités freinent lourdement l’achèvement de sa thèse, jusqu’au jour où Jonathan décide de tout mettre en œuvre pour la terminer : “J’ai engagé un étudiant pour m’assister dans ma pratique d’avocat et je suis parti six mois à l’Université de Zurich en tant que visiting researcher. Je me suis enfermé dans la bibliothèque de droit, sans mon téléphone portable pour ne pas être distrait, et en six mois, je suis presque arrivé au bout”. 2Son doctorat achevé, Jonathan se recentre sur sa pratique d’avocat et développe de nouveaux projets entrepreneuriaux. L’enseignement l’attire aussi beaucoup et lorsque l’Université de Neuchâtel met au concours deux charges d’enseignement en droit alignées sur ses domaines d’intérêts, il postule: “J’étais très intéressé à l’idée d’enseigner parallèlement à ma pratique d’avocat. Ce qui m’attirait, c’était de pouvoir toucher autant à la théorie qu’à la pratique, et d’expérimenter la synergie entre les deux”. Cette nouvelle activité le pousse à redéfinir son mode de travail: “Quand j’ai su que j’allais enseigner à Neuchâtel, j’ai décidé de me réorganiser à l’étude, : déléguer d’avantage et limiter le nombre de mandats. Cela m’a permis de libérer du temps pour m’investir à l’Université”.

Aujourd’hui, Jonathan entend maintenir en parallèle ses activités d’avocat, entrepreneur et chargé d’enseignement, tout en veillant à les enrichir de nouvelles perspectives: “J’ai le projet d’écrire un livre pour mon cours de négociation. Ce qui m’intéresse aussi, c’est d’ajouter une dimension un peu plus créative, un peu plus visuelle. Les articles académiques classiques, c’est une manière de transmettre l’information et de communiquer. Mais il y a d’autres médias qui m’intéressent. Je pense aux podcasts, aux vidéos, aux newsletters. Il n'y en a pas tellement dans le monde universitaire”. Et surtout, dans le passé comme pour l’avenir, Jonathan suggère d’oser se réinventer: Les valeurs ajoutées du doctorat Un titre qui ouvre des portes Le doctorat m’a permis d’enseigner à l’université. Cela m’a permis d’être un candidat crédible et d’obtenir un poste [de chargé d’enseignement] que j’adore. Il me donne une certaine légitimité lorsque je donne des conférences et, peut-être, une certaine crédibilité à l’égard de client·es exigeant·es. La rigueur de l’honnêteté intellectuelle La rigueur requise pour la réalisation d’un doctorat joue un rôle important dans beaucoup d’autres projets dans lesquels on a besoin de personnes fiables, qui tiennent leurs engagements et font preuve d'honnêteté intellectuelle. Faire un doctorat, ce n'est pas seulement développer une expertise dans un domaine, c'est aussi démontrer sa capacité à porter un projet sur le long terme. Cela requiert une rigueur intellectuelle qui génère aujourd’hui chez moi une certaine réticence face aux personnes qui affirment des choses sans les avoir vérifiées. Comme chercheur·e, on développe, je crois, une espèce de radar anti-bullshit. Une phase de construction personnelle J’ai appris à rédiger des longs textes. C’est dur, on rédige, on révise, et finalement on y arrive. J’ai aussi trouvé mon propre style d’écriture. J’ai beaucoup admiré des auteur·es qui osaient certaines choses. Et c’est d’abord par mimétisme avec ces auteur·es que l’on se construit. Le fait que d’autres l’aient fait m’a en quelque sorte autorisé à sortir des sentiers battus. Les juristes qui ont embrassé une approche interdisciplinaire m’ont servi de modèles.“Il y a un conseil que j’aime bien qui est de s’engager dans des activités qui se situent à l’intersection entre ce qui nous passionne, ce pour quoi on est doué·e et ce dont on peut tirer un revenu. Mais au-delà de ça, il ne faut pas se mettre trop de barrières, on a le droit d’évoluer et de se réinventer”.

Jonathan retient deux leçons de son parcours doctoral. La première est de savoir renoncer à certains projets pour mieux garder le cap : “J’ai mené mes activités d’avocat et d’entrepreneur en parallèle de mon doctorat. Aujourd’hui, je me focaliserais complètement sur le doctorat et je le terminerais avant de lancer ma pratique d’avocat indépendant. Au fond, le doctorat, c’est un projet sur lequel il faut être très focalisé. Si on veut arriver au bout, il faut être capable de dire non à certains projets. Et à cette époque, j’ai plutôt dit oui à trop de choses”. La deuxième est de mieux structurer son travail, par exemple à travers une thèse par articles : “Si c’était à refaire, j’adorerais faire une thèse par articles. Ce que j’ai trouvé compliqué dans le doctorat, c’est le manque d’échéances. Une manière d’y remédier et de garder le rythme, c’est de faire une thèse par articles. En termes de productivité et de calendrier, si j’avais eu une conférence à donner sur un sujet, j’aurais rédigé l’article et je l’aurais délivré pour la date convenue. Ça m’aurait fait une première partie de ma thèse, puis une deuxième, et une troisième. Maintenant que je suis des étudiant·es qui rédigent leur mémoire de master, je vois à quel point j’ai été livré à moi-même tout au long du doctorat, ce qui n’a pas toujours été simple à gérer”.

Un titre qui ouvre des portes Le doctorat m’a permis d’enseigner à l’université. Cela m’a permis d’être un candidat crédible et d’obtenir un poste [de chargé d’enseignement] que j’adore. Il me donne une certaine légitimité lorsque je donne des conférences et, peut-être, une certaine crédibilité à l’égard de client·es exigeant·es. La rigueur de l’honnêteté intellectuelle La rigueur requise pour la réalisation d’un doctorat joue un rôle important dans beaucoup d’autres projets dans lesquels on a besoin de personnes fiables, qui tiennent leurs engagements et font preuve d'honnêteté intellectuelle. Faire un doctorat, ce n'est pas seulement développer une expertise dans un domaine, c'est aussi démontrer sa capacité à porter un projet sur le long terme. Cela requiert une rigueur intellectuelle qui génère aujourd’hui chez moi une certaine réticence face aux personnes qui affirment des choses sans les avoir vérifiées. Comme chercheur·e, on développe, je crois, une espèce de radar anti-bullshit. Une phase de construction personnelle J’ai appris à rédiger des longs textes. C’est dur, on rédige, on révise, et finalement on y arrive. J’ai aussi trouvé mon propre style d’écriture. J’ai beaucoup admiré des auteur·es qui osaient certaines choses. Et c’est d’abord par mimétisme avec ces auteur·es que l’on se construit. Le fait que d’autres l’aient fait m’a en quelque sorte autorisé à sortir des sentiers battus. Les juristes qui ont embrassé une approche interdisciplinaire m’ont servi de modèles.

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