Au programme
Allocutions de:
Doctorats honoris causa:
Prix de l'Université de Lausanne:
Prix de la Ville de Lausanne:
Prix de la Société Académique Vaudoise:
Dies academicus 2008: Gilles Paisant honoré par la Faculté de droit et des sciences criminelles
Gilles Paisant reçoit le grade de docteur en droit honoris causa. Professeur à l'Université de Savoie à Chambéry, il y a créé un centre de recherche sur le droit de la consommation. Depuis 1997, il dirige en commun avec l'UNIL un diplôme en droit français, suisse et comparé de la concurrence et de la consommation (master en Suisse).
Ce droit est né au début des années 1970 en plein essor de la société de consommation. Il vise à maintenir ou rétablir un équilibre dans la relation entre le fournisseur professionnel d'un produit ou d'un service et le consommateur. Selon Gilles Paisant, ce droit n'est pas le même dans un pays très libéral comme la Suisse et dans une France plus soucieuse de la protection des faibles. La
Concernant la consommation, il faut instaurer des mécanismes juridiques pour remédier à la triple infériorité technique, économique et juridique du consommateur. Le professionnel possède les informations techniques sur son produit ou son service, ainsi que les moyens économiques et juridiques pour imposer sa loi. En France, la protection du consommateur peut s'appuyer sur de nombreux textes réunis dans un code de la consommation. On voit l'intérêt pour notre pays de comparer les deux systèmes législatifs et pour l'UNIL de poursuivre sa collaboration entre la Faculté de droit et des sciences criminelles et l'Université de Savoie.
Dies academicus 2008: Alain Tanner honoré par la Faculté des lettres
Une leçon d'utopie
Le cinéaste suisse en 1975, pendant le tournage de Jonas qui aura vingt-cinq ans en l'an 2000. Il reçoit le grade de docteur ès lettres honoris causa. Survol d'une longue et belle carrière menée en toute liberté
C'est avec joie que l'UNIL reconnaît en Alain Tanner l'auteur d'une oeuvre appelant à l'intelligence et à la liberté, y compris celle qui fut la sienne par rapport à l'institution universitaire de son temps. Dans Ciné-mélanges, ouvrage paru en mai 2007, il se décrit au sortir de ses études comme "une sorte de miraculé". Foin de malentendu: c'est précisément la liberté d'Alain Tanner qui est saluée par la Faculté des lettres et sa section d'histoire et esthétique du cinéma.
Avec Paul s'en va, son dernier film en 2003, Tanner a pris congé du cinéma, un territoire qui fut pour lui non pas un refuge dans les belles images, les costumes du passé, l'exploration du quotidien, ou la cinéphilie, mais un outil pour essayer de voir le réel autrement et pour remettre l'idée de plaisir au coeur de nos vies volées, pour ne pas dire aliénées. Car Tanner est un cinéaste de la joie à la fois retrouvée et toujours menacée dans la Suisse opaque qu'il critique dès Charles mort ou vif en 1969, son premier long métrage de fiction.
Il est proche de Claude Goretta et de Michel Soutter en cette époque de «nouveau cinéma suisse». Entre 1964 et 1970, il réalise de nombreux reportages et portraits pour la Télévision suisse romande. Il reviendra brièvement au documentaire en 1994 avec Les Hommes du port, excellente chronique sur l'univers des dockers de Gênes et leur organisation syndicale hors du commun, éloge d'un monde professionnel menacé.
Chacun peut exprimer ses préférences dans la filmographie de Tanner. Il y a bien sûr les titres très connus comme La Salamandre (1971) et Jonas qui aura vingt-cinq ans en l'an 2000 (1976). La soussignée adolescente avait adoré Messidor en 1979, la dérive dure de deux jeunes citadines dans nos vallées alpines. Plus tard, Dans la ville blanche (1982) nous fit connaître Bruno Ganz et aimer Lisbonne. Puis en 1991, bonheur de suivre dans un village espagnol L'Homme qui a perdu son ombre, un film d'une beauté saisissante…
Tanner peut enthousiasmer son spectateur avec des paroles vraies portées par le vent et des personnages ancrés dans un paysage unique, où l'on pénètre avec la sensation d'arriver au milieu du monde. Contre la violence économique et l'écrasement des esprits, il prône une résistance poétique. A l'heure où le cinéma propose de terrifiants portraits de méchants, l'innocence des personnages tannériens rappelle des temps plus cléments où un cinéaste pouvait, malgré un certain pessimisme, nous inviter à être joyeux et à partir à la recherche du beau.
Dies academicus 2008: Philippe Roch honoré par la Faculté des géosciences et de l'environnement
L'écologie dans l'âme
Philippe Roch dit de lui-même qu'il est un pessimiste actif. Son engagement en faveur de l'écologie lui est consubstantiel: "C'est bien l'intimité avec la nature, que j'ai développée dès mon plus jeune âge, et le constat des dégâts que les êtres humains commettent sur elle qui ont orienté ma vie", explique-t-il.
Son arrière-grand-père, paysan français de la Roche-sur-Foron, immigre en Suisse. Son père est agent immobilier, mais pour Philippe Roch, ses racines paysannes priment et ce sont elles qui l'ont incité à vivre aujourd'hui à Russin, dans la campagne genevoise, où il est consultant indépendant.
Né à Lancy, dans le canton de Genève en 1949, Philippe Roch est le cadet de neuf enfants. "La table familiale était souvent le lieu de débats politiques", se souvient-il. Et le jeune homme se lance très tôt dans l'arène, puisqu'il est élu au Conseil municipal de Lancy à 22 ans et au Grand Conseil de l'Etat de Genève à 24 ans. Il est alors membre du PDC, "le parti de ma lignée", dit-il, dont il démissionne rapidement, par esprit d'indépendance. Philippe Roch rêve d'être médecin de campagne, mais il se tourne finalement vers la biochimie. Il crée la section genevoise du WWF, une organisation dont il est membre depuis l'âge de quinze ans, tout en terminant sa thèse de doctorat.
Philippe Roch se passionne pour les questions d'aménagement du territoire et traite des dossiers chauds, comme celui du nucléaire. Il participe notamment au combat contre le réacteur nucléaire de Creys-Malville en France voisine, milite pour la réintroduction du lynx en Valais. Il prend la tête du WWF Suisse et remporte la bataille de Rothenthurm, une zone de marais, promise à devenir une place d'armes. De 1992 à 2005, l'écologiste devient directeur de l'Office fédéral de l'environnement: "Malgré mon côté militant, je respecte les institutions et je crois en elles", affirme-t-il. Il s'engage contre les OGM, assiste au Sommet de la Terre de Rio, préside la Convention de Bâle et se préoccupe du commerce international des déchets.
En 2007, Philippe Roch doit affronter la maladie, une tumeur au cerveau, opérée avec succès. Cet homme passionné, qui cultive la sobriété, la rigueur scientifique et s'intéresse aux questions spirituelles, est logiquement le lauréat de la Faculté des géosciences et de l'environnement.
Dies academicus 2008: Luc Ciompi honoré par la Faculté de biologie et de médecine
Né le 10 octobre 1929 en Italie, Luc Ciompi a fait ses études de médecine à Berne et à Genève. Sa carrière d'enseignant l'a conduit à l'Université de Lausanne dans les années 1960-70 puis à nouveau à Berne, où il a dirigé la Clinique sociopsychiatrique universitaire jusqu'en 1994. Cet éminent socio-psychiatre a beaucoup étudié les interactions entre la pensée dite rationnelle et la vie affective, ce qui lui a permis de développer de nouvelles méthodes de traitement de la schizophrénie. L'effet de nos sentiments sur la pensée, ainsi que sur la mémoire, l'intéresse aujourd'hui pour aborder dans un nouveau livre en préparation le rôle des sentiments collectifs sur les événements sociaux.
Sur proposition de la Faculté de biologie et de médecine, l'UNIL décernera un doctorat honoris causa au professeur Luc Ciompi, également connu pour ses recherches rétrospectives sur l'évolution des maladies mentales. Cette "Enquête de Lausanne" étudiait le devenir de plus de 5000 ex-patients de l'Hôpital de Cery sur une durée moyenne de 30 à 40 ans. La moitié des personnes concernées par une maladie très grave comme la schizophrénie avaient vu leur état s'améliorer sur le long terme. D'une façon générale, cette enquête révélait une influence positive de l'âge avancé sur certaines maladies mentales. Des résultats qui peuvent surprendre aujourd'hui encore.
Site Web: www.ciompi.com
Dies academicus 2008: Heidi Diggelmann reçoit le Prix de l'Université de Lausanne
Concilier recherche et vie familiale
Heidi Diggelmann, pouvez-vous décrire votre parcours professionnel?
J'ai 72 ans, je suis médecin de formation et professeure honoraire de l'Université de Lausanne. Spécialiste de la recherche virale, j'ai dirigé l'Institut de microbiologie à l'UNIL, avant de présider le Conseil de la recherche du Fonds national suisse.
Votre plus grand accomplissement à la tête du Fonds national suisse de la recherche scientifique?
Les pôles de recherche ont beaucoup fait bouger les scientifiques et les universités. Les professeurs boursiers, payés par le FNS et bénéficiant d'une grande autonomie, nourrissent la relève universitaire. Ces professeurs disposent de fonds et peuvent constituer une équipe: ils ne sont plus sous la tutelle de professeurs installés.
Quelle est selon vous la question prioritaire pour vos successeurs?
Il faut favoriser l'interdisciplinarité et encourager les recherches originales se développant à l'interface des différentes disciplines scientifiques. Hélas, l'évaluation de tels projets est délicate.
Que penser de la présence très remarquée ces temps de professeurs étrangers en Suisse?
Cela fait partie de la vie universitaire et je n'y vois pas de problème particulier. En revanche, nous pouvons constater des vitesses variables de formation entre universités suisses et européennes, dans les sciences humaines notamment. A âge égal, certains candidats étrangers ont davantage de publications et d'expérience que les candidats locaux. J'ai rencontré des chercheurs conscients de se trouver dans une impasse à près de 40 ans. Ils avaient perdu du temps à accomplir des tâches non valorisées pour l'obtention d'un poste professoral. Je défends le «mentoring» non seulement pour les femmes mais pour tous les jeunes.
Pour les femmes, plus précisément, qu'avez-vous fait?
Nous avons amélioré la représentation des femmes à tous les niveaux, sans compromis sur le plan de la qualité. Nous avons aussi voulu créer des conditions pour faciliter recherche et vie familiale. Plutôt que de mettre l'accent sur la réinsertion, le but est de permettre aux femmes de ne pas quitter leur carrière universitaire. Par exemple, certaines boursières obtiennent un complément de salaire pour les frais de garde des enfants.
Quelles sont vos activités en ce moment?
Je donne mon avis sur des projets et stratégies de recherche en Allemagne et en Autriche, au sein de grandes institutions académiques et organisations de promotion de la recherche. En Suisse, je suis active dans certaines fondations privées. Les institutions publiques, comme vous le savez, connaissent souvent une limite d'âge. Je pense que c'est bien de laisser la place aux plus jeunes, mais il ne faudrait pas se priver non plus de certaines compétences utiles.