Une étude menée par le Service de dermatologie et le Centre des données biomédicales du CHUV ouvre de nouvelles perspectives pour les personnes atteintes de maladies inflammatoires de la peau comme le psoriasis, l’eczéma et le lupus, notamment lorsque les traitements usuels ne fonctionnent pas. L’équipe de recherche a identifié des signatures immunitaires spécifiques liées aux mécanismes sous-jacents de ces pathologies. Cette découverte ouvre la voie à des traitements personnalisés et efficaces. La recherche vient d’être publiée dans la revue "Nature Communications".
Complexes par nature, les maladies inflammatoires de la peau résultent de dysfonctionnements immunitaires. Elles entraînent des symptômes chroniques qui affectent considérablement la qualité de vie des personnes atteintes. Malgré les progrès constants dans la prise en charge, des approches personnalisées permettant d'adapter les traitements au profil génomique de chaque patient⸱e manquent encore, en particulier lorsque les résultats thérapeutiques sont insatisfaisants.
Sept signatures immunitaires identifiées
Une étude dirigée par le Pr Michel Gilliet, chef du Service de dermatologie du CHUV et professeur à la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL, apporte de nouvelles connaissances précieuses. Elle est le fruit d’une collaboration entre médecins, biologistes et bio-informaticien⸱nes: Teofila Caplanusi, Jeremy Di Domizio et Antoine Girardin en sont les premiers co-auteurs. En analysant de multiples données génomiques issues de prélèvements de peau, son équipe a identifié sept signatures immunitaires distinctes. Ces signatures correspondent à des voies immunitaires clés impliquées dans l'inflammation.
«Nous avons cartographié les différentes maladies inflammatoires pour en identifier les voies immunitaires spécifiques, créant ainsi une carte moléculaire utile pour un diagnostic précis et une orientation thérapeutique adaptée, explique le Pr Gilliet. Cette approche constitue un outil diagnostique crucial, notamment lorsque les évaluations cliniques traditionnelles ne suffisent pas.»
De meilleures chances de succès thérapeutique
Identifier la signature immunitaire de la maladie pour chaque patient-e aide ainsi les médecins à choisir les traitements les plus adaptés aux mécanismes immunitaires sous-jacents. Cette approche personnalisée améliore considérablement les chances de succès thérapeutique, notamment chez les personnes résistantes aux traitements classiques ou nouvellement diagnostiquées.
«Au CHUV, nous utilisons désormais cet outil dans notre routine clinique pour les patientes et patients atteints de maladies inflammatoires complexes ou résistantes aux traitements, précise la Dre Teofila Caplanusi, cheffe de clinique au Service de dermatologie du CHUV et première co-auteure de l'étude. Par exemple, pour un eczéma ne répondant pas au traitement habituel, obtenir un profil génomique en 2 semaines nous permet d’ajuster la prise en charge et d'améliorer significativement les résultats et la qualité de vie.»
Des perspectives pour développer de nouveaux traitements
«Cette approche fondée sur une médecine guidée par des analyses de données représente une avancée majeure dans la médecine de précision, souligne le Pr Raphael Gottardo, directeur du Centre de la science des données biomédicales du CHUV et co-auteur de l'étude. Comprendre le paysage moléculaire de ces maladies pourrait également permettre d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques, de prédire l’efficacité de traitements en développement ou encore de mieux cibler les essais cliniques. C’est l’une des premières démonstrations de l’impact de la science des données moléculaires en clinique.»
Au CHUV, une plateforme intégrant des données moléculaires et cliniques est en cours de développement, avec pour objectif d'accélérer la prise en charge des patients par les clinicien⸱nes du Service de dermatologie. Cette initiative placera le CHUV à l’avant-garde de la dermatologie de précision. Par ailleurs, un réseau international est en train d’être établi pour partager cette cartographie moléculaire et ainsi faire progresser la médecine personnalisée en dermatologie à l’échelle mondiale.
Le Service de dermatologie et vénéréologie du CHUV prend en charge environ 30’000 patient⸱es par année pour des maladies inflammatoires de la peau.